CDM 2022 : après le doute, des bonnes raisons d’espérer pour l’équipe de France

Mbappé équipe de France

C’est avec deux victoires que l’équipe de France de football débute sa coupe du monde 2022 au Qatar, synonyme de qualification pour les 8ème de final. Après une entame de match difficile contre l’Australie (1 but des australiens à la 9ème minute, Lucas Hernandez out pour le reste du Mondial) on pouvait craindre que les bleus reproduisent des débuts de compétitions internationales souvent compliqués, toute compétition confondue. Rappelons que c’est souvent à l’arrache que l’équipe de France gagne ses premiers matchs d’entrée en compétition. Pour en témoigner, la dernier confrontation France-Australie 2018 est encore présente dans tous les esprits, avec une courte et difficile victoire des français (2-1) obtenue grâce à un but de Behich contre son camp à la 80’ !

Il est vrai que les 20 premières minutes du match de mardi soir ont été particulièrement stressantes pour nous spectateurs et fans des bleus. Une équipe de France dominée dans pratiquement tous les compartiments du jeu (à l’exception peut-être du couloir occupé par Mbappé) par des australiens aussi solides que vaillants, nous pouvions craindre le pire pour la suite, traumatisés aussi par les épisodes malheureux de 2002 et de 2010 en Corée du Sud et Afrique du Sud. Les déboires de l’Argentine dans son premier match, super favori de la compétition, battue 2-1 contre une surprenante Arabie Saoudite, n’ont pas non plus contribué à nous rassurer.

Sans oublier aussi combien certains médias nous avaient préparé tout au long des 2 semaines précédant la compétition à une éventuelle déconvenue suite aux forfaits de Pogba et Kanté, puis ceux de Kimpembe et Nkunku pour finir par le renoncement définitif sur blessure du Ballon d’Or Benzema et éventuellement celui de Varane toujours en délicatesse avec une blessure subie quelques semaines plus tôt.

Orpheline de tous ces joueurs cadres, la France ne semblait pouvait être que l’ombre d’elle-même et pas en mesure d’aller loin dans cette compétition. D’autant plus que seuls 7 champions du monde 2018 figurent dans la liste des 25, un effectif donc largement renouvelé mais forcément inexpérimenté. Pour une presse toujours prompte à faire la une et maintenir en haleine les amoureux du ballon rond, les déconvenues de l’équipe de France étaient l’occasion d’éveiller les passions en anticipant le pire et suscitant mille interrogations. Exceptionnellement l’excès de confiance pour des bleus auréolés d’un titre de champion du monde n’était pas au rendez-vous. L’évocation des déroutes 2002 et 2010 après deux finales disputées, confortée par des statistiques et l’improbabilité de deux succès consécutifs (même le grand Brésil n’y est pas parvenu!)  la presse française a contribué largement à alimenter ce climat de doute.

Des doutes sur le potentiel conquérant des bleus

Il est vrai que la récente contre-performance du onze français en ligue des nations n’encourageait pas à l’optimisme. Beaucoup de commentateurs insistent, à juste titre, sur l’immaturité du milieu de terrain français,  remanié en l’absence de Pogba et Kanté, autour d’un Griezmann inefficace qui ne pèse plus sur le jeu des français et ne brille guère dans ce statut de meneur de jeu que l’on voudrait le voir endosser. Le doutes s’installent aussi sur la pertinence d’un 3-5-2 mis en place depuis quelques mois par Deschamps.

Des bleus en panne d’inspiration et d’efficacité offensive et défensive

Malgré les présences d’un Mbappé, rayonnant au PSG et d’un Benzema en passe d’être sacré meilleur joueur du monde, la France perd 3 matchs et concède 2 nuls sur 6 matchs joués en ligue des nations.

Avec un bilan négatif de 5 buts marqués contre 7 encaissés, le solde de -2 buts fait montre d’une fragilité défensive, pourtant point fort des français durant la coupe du monde 2018 et la ligue des nations 2020/2021.

Un milieu de terrain inexpérimenté source d’incertitudes

Autour de Griezmann et de Rabiot dans une moindre mesure, le milieu de terrain doit se recomposer avec l’arrivée de nouveaux joueurs, n’ayant pas fait leurs preuves au plus haut niveau international. Des Tchouaméni, Fofana, Guendouzi et autre Camavinga, aucun de ces joueurs n’a disputé une phase finale d’une grande compétition internationale.

Le doute est donc de mise quant à la fiabilité de l’entre-jeu français et sa capacité à faire oublier les tauliers Pogba et Kanté. Pourtant une analyse plus fine de la situation et du potentiel réel de ces joueurs, pas aussi inexpérimentés qu’il n’y paraît, aurait permis de modérer ce scepticisme ambiant.

Ce que France/Australie 2022 nous dit des points faibles du onze tricolore

Stress d’un premier match de compétition, poids de l’enjeu, excès de prudence ? mis à part Mbappé, fringant depuis son premier touché de balle, c’est toute l’équipe qui est en deçà de son niveau réel.

En premier lieu, la défense a du mal à trouver ses marques, avec un Pavard notamment en retard sur toutes ses interventions et à la peine dans ses relances. Inexplicable aussi son incapacité à venir servir un Dembelé pourtant susceptible de débordements par sa rapidité sur le flanc droit, pour venir servir au centre un GIROUD souvent à l’affût dans la surface de réparation. Un Pavard qui au final porte une lourde responsabilité sur le but des australiens, après avoir oublié un Goodwin positionné dans son dos et complètement seul pour venir crucifier le capitaine de l’équipe de France Hugo Lloris.

En l’absence de Varane, la charnière centrale nouvellement formée avec un Tchouaméni en position d’essuie-glace devant une défense à quatre, peine également à trouver ses marques, sans doute déséquilibrée par un Pavard étonnement figé. C’est Griezmann qui contre toute attente, par sa présence dans l’axe et sur le flanc droit, s’oblige à venir contrer les australiens !

C’est seulement après 25 minutes de jeu que les français se mettront véritablement en ordre de marche et notamment exerceront un pressing haut sur les joueurs australiens pour enfin égaliser à la 27ème minute !

Des points positifs paradoxalement rarement évoqués

Olivier Giroud : l’opportunisme devant le but

Si le forfait de Benzema est indéniablement un coup dur pour l’équipe de France, la présence d’un Giroud aurait dû rassurer. En verve depuis le début de saison avec son club de l’AC Milan et l’équipe de France privée de Benzema depuis la mi-octobre, en passeur et marqueur, il est redevenu efficace et performant dans chacune de ses sorties. On devine également que ce joueur cadre de l’équipe de France, champion du monde 2018, jouant sa dernière coupe du Monde est en pleine possession de ses moyens autant sur le plan physique que mental. Sans pour autant affirmer qu’il n’a rien à envier à KB9, le poids qu’il est capable de faire peser sur les défenses adverses, ses qualités athlétiques et son opportunisme devant le but, sont autant d’atouts que la presse et les médias ont eu tendance à oublier, sans doute trop accaparés  par le cas Benzéma. Rappelons-le également : Olivier Giroud c’est aujourd’hui 51 buts en EdF, à égalité avec T.Henry, un mental à toute épreuve, un impact positif réel sur le collectif, sur et hors du terrain.

Kylian Mbappé : la force tranquille

Que dire de ce joueur pétri de talent, sinon qu’à chacune de ses sorties internationales il nous éblouit en faisant trembler les défenses des équipes du monde entier ? Pourtant pas épargné par les critiques et les polémiques, que ce soit en club ou en sélection, la foi de ce joueur semble inébranlable. Kylian Mbappé,  l’électron libre de l’équipe, ne semble jamais s’embarrasser de questions superflues et c’est seul l’instinct du buteur qui semble régler son jeu et ses courses vers l’avant avec le succès qu’on lui connait.

Lors du début de rencontre contre l’Australie, il est sans doute le seul à ne pas avoir douté dans les 20 premières minutes, sa vivacité, sa vitesse faisant la différence face à un adversaire forcément prévenu, préparé et organisé à contrer le feu-follet français. Au-delà, c’est bien le mental d’acier de Mbappé qui impressionne. Tout semble tellement facile et naturel pour ce joueur d’exception, dribbles, courses, tirs au but dans n’importe quelle position, plus qu’un compétiteur, c’est un artiste et toujours avec le sourire Monsieur !

Antoine Griezmann : le meneur de jeu naturel

On attend tellement de ce joueur qui a tant apporté lors des dernières compétitions internationales, que l’on finit par le trouver presque fade et pas à son niveau lorsqu’il ne marque pas en sélection. Mettant l’accent sur son rôle d’animateur offensif de l’EdF, on en a presque oublié qu’il sait aussi défendre, ce qui n’est pas moins précieux lorsque l’équipe est dominée, voire pressée dans ses 25 mètres. Ses gestes de récupérations défensives sont à l’origine de contres offensives qui se révèlent souvent mortelles pour les équipes adverses. Ce fameux jeu en passes courtes en triangle avec ses compères Mbappé et Giroud, devant et dans la défense adverses, provoque souvent une action dangereuse et des occasions de buts.

N’oublions pas que son tout début de saison avec l’Atlético de Madrid a été délicat. le plus souvent sur le banc de touche, n’entrant finalement que les 30 dernières minutes, pour limiter son temps de jeu en conformité avec  le contrat de prêt signé entre l’Atlético et le BarçaSur ce début de saison, il a pourtant été souvent décisif, en tant que passeur et buteur. Mais cette obligation de temps de jeu limité du début de saison ne serait-elle pas finalement une excellente chose,  puisque c’est préservé physiquement qu’Antoine Griezmann aborde sa 3ème coupe du monde consécutive.

Adrien Rabiot pour faire oublier Matuidi

Dans un registre de jeu sensiblement identique à celui de Blaise Matuidi, le turinois s’est plutôt montré à son avantage depuis le début de saison, même si l’on sent chez lui un potentiel offensif supérieur mais tout en retenu (consignes du coach?) qui reste à exploiter avec l’EdF. Ses ambitions  à plus de responsabilités au sein du groupe France, si elles étaient sans doute moins réalisables en présence de Pogba et Kanté, semblent pouvoir se concrétiser en leurs absences. C’est d’ailleurs ce qu’il vient de montrer avec ce premier but de l’équipe France à la 27ème minutes contre l’Australie, but et réaction qui ont véritablement sonné le réveil du onze tricolore. On peut aussi imaginer qu’Adrien Rabiot aura à cœur de faire oublier les déconvenues et les polémiques liées à sa non qualification dans le groupe des 26 en partance pour la Russie en 2018. Sa prestation contre le Danemark semble d’ailleurs nous donner raison sur les bonnes intentions du joueur et son potentiel offensif.

Des jeunes inexpérimentés ? Pas tant que ça !

On a beaucoup dit du manque d’expérience du milieu de terrain français remodelé pour la circonstance, remodelage coïncidant avec les résultats en demi-teintes de l’équipe de France depuis quelques mois. En effet, Tchouameni, Fofana, Guendouzi et Camavinga ne totalisent à eux quatre que 27 sélections en EdF contre 146 sélections cumulées pour Pogba et Kanté. Le quatuor ne peut guère rivaliser sur le plan de l’expérience avec leurs illustres prédécesseurs. Pourtant, Tchouameni et Camavinga évoluent au Réal de Madrid, club avec lequel le second a remporté l’édition 2021/2022 de la Champions Ligue. Difficile de dire que la multiplication des matchs dans la meilleure équipe du moment ne soit pas formateur et source d’expérience au plus haut niveau.

Quant à Guendouzi et Fofana, ils évoluent tous deux dans le championnat français, à Marseille et à Monaco, respectivement 4ème et 6ème du classement de Ligue 1. Ils participent par ailleurs aux éditions 2022/2023 de la Champions League et de l’Europa League.

Revenons sur le cas Tchouaméni. A noter que lors de ses dernières sorties avec l’EdF, par la sobriété de son jeu et la qualité de sa relance, Aurélien aura su au moins palier aux absences de Pogba et Kanté. Si sa prestation de début de rencontre contre l’Australie fut difficile, sans doute liée à l’obligation de compenser les erreurs de placement d’un Pavard complètement à côté du sujet, il a par la suite tenu son rôle d’essuie-glace ne ménageant pas ses efforts devant sa solide défense centrale, laissant l’initiative offensive à son compère Rabiot. Sa prestation contre le Danemark fut encore meilleure, avec un bon niveau de récupération des ballons et près de 99 % de réussite dans ses passes. Il y a tout lieu de croire qu’il va encore s’améliorer au fil de la compétition.

Si on devait comparer les versions 2018 et 2022 de l’équipe de France

Bien sûr que le titre de champion du monde obtenu par l’équipe de France 2018 lui donne un sérieux avantage sur sa sœurette 2022. Mais elle lui ressemble étrangement par ce savant équilibre entre cadres expérimentés avec des jeunes comptabilisant à peine une dizaine de sélections et parfois moins.

Mis à part ce titre prestigieux, sur le plan de l’expérience, regardant de plus près la liste des 23 joueurs retenus en 2018, l’effectif comptait pas moins de neuf joueurs inexpérimentés n’ayant jamais participé à une phase finale d’une grande compétition internationale ! Parmi les Pavard, Hernadez, Umtiti, Tolisso, Dembelé, Kimpembe, Thauvin, Lemar et Mbappé, quatre d’entre eux seront des quasi-titulaires à part entière lors de l’obtention de ce second titre de champion du monde.

Parmi la liste des vingt-cinq joueurs retenus dans la version 2022, dix-huit évoluent dans dix des meilleurs clubs européens ! Pour n’en citer que quelques-uns : Tchouameni et Camavinga au Réal de Madrid ; Dembelé et Koundé à Barcelone ; Pavard, L.Hernandez et Upamecano au Bayern de Munich, Varane à Manchester United…..  5 d’entre eux ont été titularisés et débutés le second match contre le Danemark et ont fait montre d’une grande maturité, rassurant et confirmant qu’il fallait bien compter sur eux pour la suite de la compétition.

Irons-nous jusqu’à prétendre que l’équipe de France version 2022 n’a rien à envier à celle des champions du monde 2018 ?

il n’y a qu’un pas que nous sommes prêts à franchir après cette facile qualification des bleus en huitième de finale

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